Popote Ginite : « Je suis très active sur le plan social »

Sociologue de formation, danseuse, comédienne, entrepreneure, Popote Ginite est cette femme dont les accomplissements ne disent pas qu’elle est forcément dans la jeune trentaine. Alliant détermination et passion, elle s’investit à bras le corps dans le social, partageant notamment avec des jeunes des quartiers marginalisés son savoir-faire à travers son association « Passage » qui se définit comme Promotion de l’Action Sociale Symbolique et Artistique pour une Génération Emancipée. Ses actions remarquables lui ont valu le titre honorifique de « Ambassadrice de bonne volonté pour la commune de Cité Soleil » en 2017 ; elle a aussi été désignée lauréate des lauréats du TOYP en 2018, entre autres distinctions. Ce n’est pas pour rien.
Démocratiser la culture
Comme l’icône de la danse traditionnelle haïtienne, Vivianne Gauthier, Popote est venue à la danse quelque peu tard, à 22 ans précisément. Après 4 années à étudier la sociologie à la Faculté des Sciences Humaines de l’Université d’Etat d’Haïti, elle a fait montre de son amour manifeste pour les arts de la scène et la danse. Elle a par la suite étudié la danse à L’Enarts (Ecole Nationale des Arts) et participé à plusieurs séances de formation en théâtre en Haïti comme à l’étranger. Des ateliers qu’elle reproduit avec des jeunes en Italie, en France, dans les quartiers marginalisés en Haïti et des villes de province dont Les Cayes, Aquin, Petit Trou de Nippes, Jacmel, Gonaïves. Ceci, en vue de démocratiser la culture. Dès les premiers balbutiements de l’organisation en 2016, elle ambitionne de changer les communautés à travers les arts : « Les jeunes qui ont un talent quelconque, nous les orientons vers des métiers artistiques et culturels, afin de leur permettre de développer leur sensibilité artistique et induire le changement social ; ceci peut effectivement leur permettre de faire des entrées économiques et se passer d’une carrière dans les « sciences dures », explique-t-elle.
« Je suis très active sur le plan social »
Ayant fait ses études classiques et passé 24 années mouvementées de sa vie à Cité Soleil, la jeune femme polyvalente reconnait que la violence est monnaie courante dans les quartiers marginalisés dont Cité soleil d’où elle vient. Cette situation représente un manque à gagner pour les investissements en général et pour le secteur culturel, en particulier. Elle a dû faire un retrait de la zone par le passé, suite à des menaces répétées, une expérience qui ne l’empêche pourtant pas à mobiliser des gens pour organiser des activités culturelles dans la zone, quelques années plus tard. « Je suis très active sur le plan social. » déclare-t-elle dans la foulée, comme pour signifier ses actions de retour aux communautés.
Passage gère avec l’association culturelle Phrase Ambulante dirigée par Evens Pierre, trois clubs littéraires : Le club littéraire Jacques Roumain, Le club littéraire Emeline Michel à Bois Neuf, Cité Soleil et le club littéraire Jean Claude Charles à La Saline. A travers ces structures, l’association mène des conférences-débats, des ateliers artistiques sur la danse, la photographie, le théâtre destiné aux jeunes, notamment les jeunes filles de Cité Soleil et de La Saline. Popote avoue, qu’à cause des conflits armés récurrents dans ces zones, qu’elles/ils ont dû assez souvent mettre en suspens leurs activités ou déplacer les bénéficiaires afin de poursuivre leurs activités au centre-ville. Toute une gymnastique que son équipe assume pleinement.
Outre son investissement social avec Passage, Popote Ginite elle a créé son entreprise dénommée BAGET en référence aux de bâtons minuscules dans la danse traditionnelle haïtienne. Elle propose des ateliers de danse ambulants, dispense des cours privés, sur demande. Si cette structure ne tient pas encore sur ses deux pieds, la satisfaction est pourtant déjà au rendez-vous : « C’est avec une grande fierté que je vois des jeunes, conscient.e.s de leurs potentialités, s’afficher, et commencer déjà à les explorer » .

Jeanne-Elsa Chéry